L’informatique quantique pourra-t-elle résoudre les mystères du magnétisme ?

Technologie : Selon une équipe du MIT, des atomes ramenés à des températures glaciales et exposés à un champ magnétique ont montré des modèles de comportement intéressants. De bonnes augures pour l'informatique quantique et la recherche en général.

Le comportement des atomes tournant dans un champ magnétique demeure une grande inconnue pour le monde scientifique. Pour autant, une étude du MIT jette une lumière nouvelle sur les lois obscures qui régissent les plus petites particules, ce qui pourrait ouvrir la voie à d'autres développements dans la conception de dispositifs quantiques reposant sur ce que les scientifiques qualifient de “spin atomique”.

L'équipe de chercheurs du MIT a exposé des atomes de lithium en rotation à des forces magnétiques de différentes intensités afin d'observer la réaction individuelle et collective des particules quantiques. Dans chaque scénario, ils ont été confrontés à une chorégraphie d'atomes surprenante, révélant une diversité de comportement inattendue dans un matériau magnétique pourtant bien connu et étudié à de maintes reprises.

La rotation, comme la masse ou la charge, est une propriété intrinsèque des atomes : les particules tournent autour d'un axe dans le sens des aiguilles d'une montre (souvent décrit comme “vers le bas”) ou dans le sens inverse des aiguilles d'une montre (“vers le haut”). En fonction de leur rotation, les atomes peuvent réagir aux champs magnétiques de différentes manières, par exemple en s'alignant avec d'autres atomes selon un schéma spécifique.

Un ballet magnétique

La rotation de nombreux atomes réunis dans un matériau magnétique et exposés à un champ magnétique peut soit atteindre un état d'équilibre, où tous les spins des atomes sont alignés, soit adopter un comportement dynamique au cours duquel les rotations de nombreux atomes créent un motif ondulé.

L'équipe de recherche du MIT s'est concentrée sur la façon dont les atomes évoluent de leur comportement dynamique vers un état d'équilibre. Elle a découvert que la force magnétique à laquelle les atomes sont exposés joue un rôle clé dans la détermination du comportement des particules. Certains aimants déclenchent un comportement dit “balistique”, lorsque les rotations atomiques retournent rapidement à l'état d'équilibre, tandis que d'autres révèlent un “comportement diffus”, les particules retournant à l'équilibre de manière beaucoup plus lente.

« En étudiant l'un des matériaux magnétiques les plus simples, nous avons fait progresser la compréhension du magnétisme », explique Wolfgang Ketterle, professeur de physique au MIT et chef de l'équipe de recherche de la prestigieuse université américaine. « Lorsque vous trouvez de nouveaux phénomènes dans l'un des modèles les plus simples de la physique du magnétisme, vous avez alors une chance de le décrire et de le comprendre pleinement. C'est ce qui me fait sortir du lit le matin et m'excite. »

Plus froid que froid

Pour étudier le phénomène, l'équipe de Wolfgang Ketterle a ramené les atomes de lithium à des températures plus de 10 fois plus froides que celles de l'espace interstellaire, figeant les particules, presque à l'arrêt, permettant une observation plus facile. En utilisant les lasers comme une sorte de pincette, les scientifiques ont ensuite saisi les atomes et les ont disposés en chapelets de perles. Avec 1 000 chapelets, chacun comprenant 40 atomes, l'équipe a créé un réseau d'atomes ultra-froid de 40 000 atomes.

Des forces magnétiques pulsées de différentes intensités ont ensuite été appliquées au réseau, faisant basculer le spin de chaque atome le long de la ficelle, à la manière d'une onde. Les chercheurs ont été capables d'imager ces motifs d'ondes sur un détecteur, et ont observé comment les atomes évoluaient progressivement d'un comportement dynamique à l'équilibre, en fonction de la nature du champ magnétique auquel ils étaient exposés.

Le processus, explique Wolfgang Ketterle, est similaire au pincement des cordes d'une guitare : jouer sur les cordes les fait sortir de leur état d'équilibre. Cela permet aux scientifiques d'observer ce qui se passe avant qu'elles ne reviennent à leur état initial. « Ce que nous faisons ici, c'est que nous pinçons les cordes. Nous introduisons ce modèle d'hélice, puis nous observons comment ce modèle se comporte en fonction du temps », souligne le chercheur. « Cela nous permet de voir l'effet des différentes forces magnétiques entre les rotations. »

Une avancée pour l'informatique quantique ?

Bien que certains de ces comportements aient été prédits de manière théorique par le passé, les modèles de spins atomiques n'avait jamais été observés en détail jusqu'à présent. Cependant, on constate que ces modèles correspondent à un modèle mathématique existant, appelé modèle de Heisenberg, couramment utilisé pour prédire le comportement magnétique.

En collaboration avec une équipe de scientifiques de Harvard, les chercheurs du MIT ont pu calculer la dynamique de cette rotation. Les résultats ne sont donc pas seulement utiles pour faire progresser la connaissance du magnétisme à un niveau fondamental, mais ils pourraient également servir de modèle pour un dispositif qui pourrait prédire les propriétés et les comportements de nouveaux matériaux au niveau quantique.

« Avec tout l'enthousiasme actuel concernant la promesse de la science de l'information quantique de résoudre des problèmes pratiques à l'avenir, il est formidable de voir des travaux comme celui-ci se concrétiser aujourd'hui », s'enthousiasme John Gillaspy, responsable de programme à la division de physique de la National Science Foundation, l'un des bailleurs de fonds de cette étude.

Une meilleure compréhension des particules quantiques pourrait également conduire à la conception de nouvelles technologies comme les dispositifs spintroniques, selon les chercheurs. Contrairement à l'électronique, qui exploite le flux d'électrons, la spintronique exploite la rotation des particules quantiques pour transmettre, traiter et stocker des informations. Elle est donc prometteuse pour l'informatique quantique, où la rotation des particules constituerait un peu d'information quantique.

François